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Le marché du parfum : comment se réinventer ?

Date de publication : 23 juin 2015 à 10:00

Le marché du parfum, mature et saturé, peine à se renouveler. Si les ventes en France ont progressé de 0.2% en valeur en 2014 – de 0.6% pour les ventes de parfums féminins – les ventes en volume ont reculé de 4.2%. Ainsi, la relative croissance du marché de la parfumerie est due à une hausse des prix des produits.

Et pour autant, comme le rappelle Nicolas Olczyk dans sa dernière analyse des tendances du marché, de nombreux consommateurs manifestent une insatisfaction relative au rapport qualité-prix du parfum : les produits seraient trop chers pour une qualité moindre.

 

I. Les tendances du marché

 

Le classement des meilleures ventes françaises de parfums féminins en 2014 conduit à s’interroger sur les attentes des consommateurs :

  1. Lancôme : La vie est belle
  2. Dior : J’adore
  3. Guerlain : La petite Robe noire
  4. Chanel : Coco Mademoiselle
  5. Chanel : N°5

J’adore de Dior a été détrôné de sa place de n°1 des ventes pour la première fois depuis 4 ans par La Vie Est Belle. Cette fragrance extrêmement sucrée, particulièrement puissante et concentrée est pourtant largement décriée par les passionnés.

Parallèlement, la multiplication des déclinaisons de parfums en version « intense » ou « extrême » rejoint notre constat initial : les consommateurs veulent « en avoir pour leur argent ».

Ce classement traduit également l’engouement croissant pour les fragrances gourmandes et régressives, certainement imputable au contexte économique difficile. Ces senteurs se voudraient rassurantes, enveloppantes et liées à l’enfance. Par ailleurs, certains sites de passionnés, Poivre Bleu par exemple, arguent que ces parfums tiendraient lieu de gourmandises sans effets sur la ligne, dans une société moderne où restrictions et privations sont le lot quotidien de nombreux actifs.

Force est de constater que le matraquage marketing entourant l’univers de la création olfactive ne semble plus suffire à convaincre le consommateur. La nouvelle campagne de Chanel dédiée au légendaire Numéro 5 mettant en scène Gisèle Bündchen dans le rôle d’une femme moderne et active n’a pas empêché la chute des ventes de ce joyau datant de 1921.

Le marché du parfum doit donc se réinventer pour convaincre sa clientèle. Face à ce constat, plusieurs tendances émergent. 

 

II. Parfums bon marché et domination par les coûts

 

D’une part, l’offre de parfums « bon marché » ne cesse de croître, tant chez des marques de soins (Le couvent des Minimes, Yves Rocher, etc.) que chez des enseignes de cosmétiques et accessoires (Réserve Naturelle par exemple), ou même au sein des Grandes et Moyennes Surfaces (Eau Jeune, Bien-être…). Ainsi, la célèbre « Eau du cloître » du Couvent des Minimes est reconnue tant pour la qualité du jus que pour son excellent rapport qualité-prix (28.90 € les 100mL).

Certaines marques reconnues de parfumerie adoptent également ce positionnement de domination par les coûts pour s’imposer sur un segment de clientèle, à l’instar de Cacharel à travers le lancement du flanker* d’Anaïs Anaïs « Mon premier délice » en 2014. Ciblant les adolescentes, le parfum est proposé à un tarif sensiblement inférieur à celui de la concurrence.

Par ailleurs, cette recherche de fragrances à faible coût a même conduit à la création de « pirates » du parfum. Ainsi, le site internet « Pirate Parfum » a profité du vide juridique relatif à la protection de la formule des parfums par le droit de la propriété intellectuelle. La Cours de cassation rappelait en 2014 encore que le parfum « n’est pas une œuvre de l’esprit susceptible d’être protégée par le droit d’auteur ». Le site Pirate Parfum propose donc à la vente, à des prix défiant toute concurrence, des copies des plus grands classiques de la parfumerie.

 

III. Le positionnement de niche et la parfumerie sélective : un relais de croissance ?

 

Une seconde tendance antagoniste semble se préciser sur le marché : le positionnement de niche rencontre un succès croissant.

Section d'or Serge Lutens

Crédit photo : Serge Lutens – Section d’or (*)

 

Ainsi, certaines marques de parfums affirment leur dimension luxueuse à travers une hausse des prix des flacons : les parfums Serge Lutens (hors gamme Palais Royal) ont ainsi connu une hausse de prix de l’ordre de 14% depuis 2007. Les parfums de la collection privée Dior auraient vu leur prix multiplié par cinq depuis leur lancement. Certes, la hausse du coût des matières premières est à prendre en considération, mais, comparativement, l’inflation sur la période se situe à 7.4%.

Parallèlement, les grandes maisons de parfum valorisent de plus en plus leurs collections exclusives. Celles-là leur permettent de proposer des parfums à la distribution bien plus sélective et à des prix supérieurs à ceux pratiqués pour leurs collections « Grand Public ». La beauté et la rareté des matières premières sont mises en avant, le savoir-faire de la maison est valorisé, les partis-pris créatifs sont plus radicaux, la communication plus discrète afin de créer un sentiment d’exclusivité. Toutes les grandes maisons proposent désormais des fragrances exclusives : la gamme Hermessence chez Hermès, les Exclusifs chez Chanel, la collection privée chez Dior, les Heures chez Cartier, etc.

Cet intérêt croissant pour le marché de la parfumerie sélective conduit d’ailleurs au rachat de certaines marques indépendantes par les grands acteurs du marché. Ainsi, l’Artisan Parfumeur et Penhaligon’s ont été rachetés par le géant Puig le 23 janvier dernier, après que le groupe Estée Lauder s’est offert la très prestigieuse marque Editions de parfum Frédéric Malle.

 

 IV. La conquête de nouveaux marchés

 

Les marques de parfumerie cherchent également à conquérir de nouveaux marchés – notamment au Moyen-Orient où les ventes croissent de 14% –  avec le lancement de fragrances adaptées pour satisfaire les exigences de la population locale. Ainsi, la grande tendance de ces dernières années est au bois de Oud, dont les effluves chauds et boisés rencontrent un franc succès au Moyen-Orient et s’imposent dans une multitude de créations.

Le marché asiatique est également en croissance – à l’exception du Japon – mais sa taille demeure modeste. En effet, si le marché des cosmétiques explose sur les territoires chinois et coréens, le parfum ne tient pas encore lieu de rituel quotidien. L’émergence de classes moyennes dans ces pays doit néanmoins susciter l’intérêt, un intérêt renforcé par des taux de croissance annuels composés de 9% en Chine au cours des cinq dernières années, 25% en Inde , 44% en Indonésie, 15% au Vietnam et 12% en Corée du Sud.

Enfin, la croissance spectaculaire du marché de la parfumerie au Brésil en fait un relais de croissance idéal pour les acteurs du marché : les ventes estimées en 2017 atteindraient 5.1 milliards de dollars.

 

V. Perspectives

 

Le marché de la parfumerie est indéniablement saturé. Les consommateurs sont perdus face à l’offre pléthorique. Ils déplorent un mauvais rapport qualité-prix, tout en regrettant une uniformisation de l’offre : tous les lancements se ressemblent et le parfum, qui représentait autrefois l’individualité du porteur, n’est plus qu’un bien de consommation comme un autre. Le parfum est désenchanté.

Les marques cherchent à se renouveler par tous les biais et misent notamment sur une offre de niche et une ouverture des marchés internationaux.

Pourtant, le succès de concepts tels que les Editions de Parfums Frédéric Malle, ou encore l’émotion suscitée par les repesées des anciennes formules Guerlain invitent à penser que la dimension artistique de la parfumerie gagnerait à reprendre de l’importance dans le processus créatif.

C’est, en tous les cas, cette « belle parfumerie » que défend le comité Joséphine, lancé dans le but de soutenir les maisons françaises de parfumerie sélective.

Panthere_Fragrance

Crédit photo : Cartier – La Panthère (*)

 

La liberté créatrice des parfumeurs s’oppose-t-elle à la loi du marché et aux objectifs commerciaux ? La dernière création de Mathilde Laurent pour Cartier : « La panthère » tend à prouver que non. Elle s’adresse au grand public, tout en réunissant création fine, qualité et reconnaissance des passionnés comme en témoigne le prix du Grand Féminin qui lui a été décerné lors de l’édition 2015 de l’Olfactorama.

Finalement, sur un marché français en perte de vitesse et homogène,  la différenciation créative représente certainement une voie salutaire.

 


 

*Parfum dérivé d’une fragrance à succès. Le flanker capitalise souvent sur la renommée du parfum originel.  Ex : La petite robe noire Eau Fraîche de Guerlain.

 


Sources :

  • Parfums, tendances et inspirations
  • Au Parfum
  • Les Echos Bourse « France : Le marché du parfum, en panne de créativité, reste atone »
  • Premium Beauty News « Le marché mondial du parfum toujours en hausse » par Emmanuelle Moeglin

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Auteur Ubiconseil
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